Des paysages verdoyants, des vêtements traditionnels colorés, de grands sourires éclatants, des cours d’eau, une grand-mère penchée sur sa marmite, un feu de bois dans une cuisine obscure…
Il ne m’en faut pas plus pour saliver d’envie à la perspective d’aller découvrir le petit village de Silvia, petit carrefour commercial situé dans le département du Cauca, dans la cordillère centrale des Andes colombiennes, à seulement 1 heure de Popayan et environ 3 heures de la ville de Cali.
Après un confinement interminable et à la réouverture des vols domestiques, j’ai tout de suite préparé mon baluchon pour partir découvrir cette destination attrayante que certains de nos voyageurs ont déjà eu l’occasion d’aller connaître.
Silvia a gagné en popularité au fil des ans au point de se convertir non seulement en une place de négoce primordiale pour les agriculteurs de toute la région mais aussi une destination touristique de petite envergure pour les amoureux de nature et de… culture.
Le village possède l’un des marchés agricoles les plus visités de la région mais c’est aussi l’un des points d’accès les plus importants aux différentes communautés indigènes Misak (ou Guambianos) qui occupent la région.
Les Misak descendent tous les mardis vendre leur production ou faire du troc sur ce marché local.
J’apprendrais par la suite que les indigènes ont aussi construit leur propre marché, situé en dehors du village, qu’ils s’apprêtent à ouvrir dans peu de temps.
Une arrivée à Silvia depuis la ville tropicale de Cali est un petit choc pour les voyageurs et représente clairement ce qu’est la Colombie : un pays très contrasté, aux reliefs variables et aux multiples cultures.
On passe d’une altitude d’environ 1000 m à 2800 m en peu de temps et un froid sec se fait sentir dès l’arrivée, contrastant avec la chaleur humide de Cali. Nous sommes dans les Andes et les habitants de cette municipalité sont en majorité des agriculteurs.
Comment expliquer que l’on se sent plus proche du mode de vie des Quechuas au Pérou que des habitants du Pacifique colombien ?
Cela n’a rien de surprenant si on y réfléchit bien, les ponchos en laine sont plus pratiques ici que sur la côte et la terre bien plus fertile pour y cultiver des pommes de terre et du quinoa !
A peine arrivée sur la place centrale de Silvia où trône un grand « I love Silvia », révélateur du changement qu’a connu le village au cours des dernières années, je suis accueillie par le grand sourire de Lorenzo, un membre de la communauté Misak dans laquelle je vais séjourner.
Il me conduit à sa moto pour partir en direction de la maison traditionnelle où je vais passer la nuit. Pendant le trajet Lorenzo me montre plusieurs hameaux ou « veredas » où vivent les différentes familles.
Il me raconte qu’il y a aussi un collège ainsi qu’un hôpital qui dessert les communautés voisines. « Lorenzo n’est pas un prénom très typique » lui dis-je.
Il me répond avec un sourire que ses parents avaient choisi ce nom à l’époque où les Misak étaient défavorisés par leur ascendance, chose à laquelle ils essayent de remédier maintenant en revalorisant leur héritage culturel.
Nous arrivons à destination après avoir parcouru seulement 15 minutes sur un large chemin en terre battue.
Il fait déjà nuit alors qu’il est encore relativement tôt. A l’arrivée, un homme habillé des pieds à la tête dans une tenue colorée, jupe bleue et ample poncho marron traversé de lignes roses, coiffé d’un chapeau à trois niveaux caractéristique – coiffe que je retrouverai plus tard sur d’autres habitants des proximités – me tend la main énergiquement.
« Bienvenue à Guambía » me dit-il avec un sourire. Wilmar possède une bonne stature, un regard droit et franc et un sourire sympathique.
Une autorité naturelle se dégage de ce jeune Misak qui m’accueille avec entrain, me présente toute sa famille et me fait visiter la maison.
J’ai une chambre pour moi toute seule, tout est pensé pour accueillir dignement le touriste chez l’habitant. C’est simple mais propre, cela me suffit amplement.
J’ai conscience que tout comme moi, le voyageur qui arrivera dans ce « pays » perdu ne viendra pas en recherche pas de grand confort mais sera friand d’échanges culturels uniques.
Je loge chez les parents de Wilmar, tandis que lui habite dans une maisonnette en contrebas avec sa femme et son fils. La mère de mon hôte m’a préparé un délicieux dîner, je suis surprise de pouvoir déguster un plat relativement élaboré : du riz avec des légumes frais cuisinés avec des herbes du potager.
Je m’attendais à un morceau de manioc et une soupe insipide comme j’en ai fait l’expérience dans d’autres ethnies colombiennes.
La famille échange avec moi avec entrain, je lis la fatigue dans leurs yeux, mais ils sont conscients de l’importance de mon arrivée pour eux, et pour leur futur.
Au fil des discussions, Wilmar me fait l’effet d’être un digne représentant de son peuple et de ses traditions. « Nous avons d’abord été persécutés par les colons espagnols puis nous-même avons commencé à délaisser notre héritage culturel pour nous fondre dans la masse » me raconte-t-il, « mais aujourd’hui nous avons compris l’importance de la préservation de nos traditions ».
Il me fait sentir dès les premiers instants qu’il fait partie de ces personnes qui sont prêtes à se battre pour la préservation de leur héritage culturel ancestral. Après avoir amplement fait connaissance, nous partons nous coucher avec des idées plein la tête.
Ma nuit a été relativement courte car le coq a élu domicile derrière mes volets. Eh oui, il ne faut pas oublier que nous sommes à la campagne et de surcroît, chez des agriculteurs.
Ici, on vit avec le soleil et on se lève aux aurores. Après avoir longuement traîné au lit, je me lève enfin sur les coups de 8 heures et je note que tous les habitants de la maison familiale sont déjà actifs depuis belle lurette.
La maman de Wilmar, qui s’active devant un bac rempli d’eau savonneuse, m’explique que certains de ses fils sont allés bouger les vaches vers d’autres pâturages pendant que d’autres sont partis aider à la collecte des truites arc-en-ciel car la famille possède aussi un élevage de truites et nous sommes en pleine période de récolte.
Après avoir terminé de laver les vêtements, cette femme de poigne se dirige vers la cuisine où elle prépare un délicieux petit-déjeuner pour tout le monde.
Là aussi, je suis agréablement surprise par le contenu : des fruits frais, des galettes de blé avec des œufs et un café en accompagnement. Les membres de la famille arrivent ensuite peu à peu pour venir se rassasier.
Assise sur mon banc de bois dans la petite cour de la maison, je remarque cette fois à la lumière du jour que les murs sont ornés de peintures. Wilmar, qui entre-temps est aussi arrivé, suit mon regard et dresse la tête fièrement.
« Mon frère est l’artiste » m’explique-t-il. Sur l’un des murs figure un portrait du grand-père de Wilmar, personnage influent qui était très respecté au sein de sa communauté.
La journée qui suivra sera une journée de découvertes avec mon hôte, son épouse et Lorenzo. Le fils de Wilmar, du haut de ses 2 ans, nous accompagne et marche sans rechigner.
Nous visitons la « maloka », sorte de cabane ronde traditionnelle qui fait office de lieu de réunion et de célébration pour les habitants de la « vereda ». Wilmar me montre avec orgueil les photos des différents projets qu’il a mis en place.
« Nous travaillons avec l’Université de Cali, les étudiants viennent pour apprendre de nous et ils nous aident aussi. Nous avons établi un sentier de randonnée dans le parc naturel qui nous entoure. »
Puis nous traversons le jardin botanique « Las Delicias » où mes guides me présentent les espèces de plantes endémiques qu’ils y préservent. Il est impressionnant de voir la quantité de choses que cultivent les Misak, ils sont presque entièrement autosuffisants.
Nous avons continué à marcher aux alentours dans un climat délicieux, froid mais pas trop, juste ce qu’il faut pour apprécier la chaleur d’une petite laine sur le haut du corps.
Les Misak sont des personnes au tempérament calme et réfléchi, caractéristique commune à la plupart des indigènes.
Mais derrière cette façade tranquille, je devine néanmoins un peuple qui gronde intérieurement au souvenir d’un passé tragique qui les a affectés pendant des siècles, un peuple aujourd’hui prêt à agir et faire front pour défendre ses intérêts.
Wilmar et ses proches sont conscients de l’importance de l’éducation pour les nouvelles générations mais surtout de l’acculturation qui les a touchés au cours des dernières décennies.
Leur but est aujourd’hui de renouer avec leurs traditions et ils savent que le tourisme est un moyen pour eux d’aider à préserver cet héritage.
Comment décrire mon expérience sans trop en raconter ? Des flash-backs me reviennent aujourd’hui encore et mon souvenir me laisse comme un sentiment de plénitude, sentiment qui décrit tellement bien l’état d’esprit des habitants de cette petite vallée.
Je revois une rivière cristalline, des moutons et des vaches qui paissent tranquillement, des travailleurs devant les bassins de truites, des champs de verdure au pied de la montagne sacrée des Misak, Wilmar me racontant les légendes indigènes.
Je revois le père de mon hôte, petit homme au visage ridé, se faire frotter un onguent d’ortie sur ses jambes douloureuses.
Je revois des enfants rire et courir autour de la maison, des nuages flottant tout autour de Guambía où les gens vivent simplement mais en harmonie totale avec leur environnement.
Enfin, je me remémore le regard d’espoir que m’ont lancé les membres de cette famille attachante au moment des adieux, et j’espère vous le transmettre pour vous donner l’envie d’aller connaitre cette communauté andine au grand cœur qui vous accueillera sans nul doute les bras grands ouverts.
- Accès à Silvia : 1h depuis Popayán et 3h depuis Cali en transport privé
- Quand y aller ? Immersion chez une famille Misak possible tous les jours, en revanche les indigènes descendent seulement les mardis au marché de Silvia
- Que faire sur place ? Possibilité de choisir entre une demi-journée, une journée complète ou une immersion de 2 nuits chez les Misak. Activités chez l’habitant, visite du marché de Silvia en option.
- Que dois-je emporter dans mon sac de voyage ? Des vêtements chauds et pratiques pour pouvoir marcher (chaussures de randonnée), une serviette, des produits de toilette, une lampe torche.
- Pour en savoir plus :
Contactez Maintenant Un Conseiller de Voyage
Construisez dès aujourd’hui le voyage de vos rêves avec l’un de nos experts du pays: